Alors que le déploiement de la 5G en France est attendu pour 2020, les techno-enthousiastes, les politiques et les scientifiques de tous bords s’écharpent sur l’enjeu de cette course aux ondes pour notre santé. Mais qu’en est-il vraiment ? Pour vous, avec la plus grande objectivité possible, nous faisons le point sur cette technologie, son intérêt pour les acteurs de la e-santé et sur son impact possible sur notre santé à tous. Et nous vous invitons à venir nourrir notre réflexion en commentant cet article.
La 5G, c’est quoi ?
La 5G (technologie sans fil de 5e génération) devrait être déployée en 2020, avec le consentement des gouvernements, dans la plupart des pays développés. Elle permet une diffusion de l’information 100 fois plus rapide que la 4G. Si votre connexion frôlera les 1GB par seconde, le temps de latence (temps d’attente lors d’une connexion sans fil) quant à lui s’en trouvera aussi raccourci, passant de 50 millisecondes à 10 voir 1 milliseconde. Cela signifie que l’affichage de nos pages web sur l’écran de nos smartphones sera quasi-instantané. Enfin, la 5G se voudra 10 fois moins énergivore, permettant une autonomie de plusieurs jours, voire plusieurs années pour les appareils les plus économes.
Comme tout système de télécommunication hertzienne, la 5G occupe des fréquences précises sur le spectre des ondes radioélectriques. Pour gagner en débit, elle devrait notamment s’appuyer sur la bande des 26 GHz, baptisée ondes « millimétriques ». Cette bande offre des fréquences allant de 24,25 GHz à 27,5 GHz.
Cependant, plus la fréquence est haute et plus la portée des ondes est courte. Celles-ci se propagent donc moins bien, plus facilement stoppées par des bâtiments ou d’autres obstacles. Pour pallier à cet inconvénient, il va donc falloir déployer en France plusieurs milliers d’antennes relais (small cells) en complément des antennes mères.
La 5G : quels enjeux pour l’économie et la e-santé ?
La 5G, c’est, pour certains, l’internet des objets (IOT). Cette technologie doit en effet permettre de développement des objets connectés et des informations qu’ils véhiculent. Voiture autonome, robotisation, outils de traduction simultanée…
Pour conserver une place dans la compétition mondiale, chaque pays se doit donc de développer rapidement la 5G. L’enjeu économique est aussi important pour les opérateurs qui auront en charge la création du réseau. Plusieurs gros acteurs des infrastructures telecom sont sur les rangs pour équiper les pays européens comme Ericsson, Nokia ou les chinois Huawei et ZTE, deux sociétés soupçonnées d’espionnage ce qui n’est pas sans inquiéter certains politiciens européens.
Dans le domaine de la e-santé, les applications de la 5G seront aussi multiples :
- Développement de la télémédecine, téléexpertise, téléconsultation,…
- Fluidité des échanges d’imagerie HD entre médecin et hôpitaux
- Organisation plus facile de réunions de concertation pluridisciplinaires (RCP) entre établissements distants
- Développement de la téléchirurgie
- Développement de la XR (réalité virtuelle et augmentée)
- Télé-suivi médical grâce à l’utilisation des objets connectés
La solution Nomadeec proposée par la société Exelus est une plateforme de télémédecine mobile d’urgence pour la télé-régulation entre le professionnel de santé sur le terrain et le SAMU-Centre 15. En permettant une télétransmission rapide et fiable du bilan numérique, Nomadeec améliore l’orientation et la prise en charge du patient. On imagine tout de suite l’intérêt de la 5G pour une telle solution.
En Suède, Andreas Claesson, du centre pour les Sciences de la Réanimation de Karolinska travaille déjà sur des prototypes de drones activés par la 5G qui seront en mesure de livrer des défibrillateurs en urgence.
Au-delà de cela, la 5G apportera aussi plus de modularité dans la gestion du réseau de communication, avec la mise en œuvre de réseaux virtuels spécialisés. Elle permettra un découpage du réseau en « tranches », qui partageront la même infrastructure physique ou cloud, mais pourront être associées à des niveaux de priorité, de fiabilité et de sécurité différents, selon les usages ciblés. Ainsi, pour un hôpital, il sera possible d’imaginer :
- un 1er réseau de très haute disponibilité pour les usages prioritaires, comme en blocs opératoires, en unités de réanimation, ou aux urgences
- un 2ème réseau pour l’accès sécurisé des praticiens au système d’information hospitalier, notamment en mobilité
- un 3ème réseau pour la remontée de données du matériel biomédical et d’objets connectés pour le suivi des constantes des patients
- un 4ème réseau pour les services de confort et de divertissement des patients.
L’intégration de la 5G avec les technologies existantes (fibre optique, wifi), encore pertinentes à moyen terme, est donc un enjeu majeur pour l’hôpital.
La 5G : quels risques possibles pour notre santé ?
Fin 2017, plus de 180 scientifiques et médecins de 36 pays ont réclamé un moratoire sur le déploiement de la 5G dans une lettre d’appel. Ils appelaient à prendre des mesures fondées sur le principe de précaution et à faire preuve de retenue jusqu’à ce que les scientifiques indépendants de l’industrie étudient les risques potentiels pour la santé humaine et l’environnement. Ils n’ont malheureusement pas beaucoup été entendus par les décideurs.
Quels sont ces risques ? Ces risques sont liés à notre exposition sur le long terme aux ondes haute fréquence qui viendront s’ajouter aux ondes auxquelles nous sommes déjà exposés (wifi, 3G, 4G). Certains parlent « d’effet micro-ondes ». Dans leur appel, les scientifiques alertent sur les risques à long terme pour notre santé : cancer, stress cellulaire, dommage génétique, trouble de la reproduction, déficits d’apprentissage et de mémoire, de troubles neurologiques.
L’effet cancérogène des champs électromagnétiques radiofréquences chez les humains demeure controversé. Cependant, une étude datant de 2014 suggère que l’utilisation intense du téléphone portable pourrait être impliquée dans l’étiologie de certains types de tumeurs cérébrales.
Aucune évaluation des effets sur la santé ni des effets sur la faune et l’environnement à long terme n’a été entreprise. Il n’y a pas de recherche montrant la sécurité ni de la 5G seule, ni de l’exposition combinée à la radiation 5G + déjà existante de GSM, 3G, WiFi, 4G, etc.
Liste de quelques études disponibles (en autres) sur le sujet :
Une étude de l’Institut RE Kavetsky de pathologie expérimentale, d’oncologie et de radiobiologie des NAS d’Ukraine, publiée en 2011, affirme que l’exposition aux rayonnements micro-ondes à long terme provoque l’accroissement du cancer.
Une étude du département d’urologie de l’université de médecine de Graz (Autriche) et du département d’andrologie de l’université du Caire (Égypte) a découvert une corrélation potentielle entre l’utilisation du téléphone cellulaire et des dysfonctionnements érectiles. D’autres études à grande échelle confirment ces données initiales et explorent les mécanismes impliqués dans ce phénomène.
L’agence Internationale pour la Recherche sur le Cancer (IARC / CIRC) a classifié les champs électromagnétiques des radiofréquences comme probablement cancérigène pour les humains (Groupe 2B), basé sur un risque accru de gliome (un certain type de tumeur associée au système nerveux), associé à l’utilisation du téléphone portable. Dans leur communiqué de presse, l’IARC affirme qu’une étude a montré une augmentation de 40% de risque de gliomes dans la catégorie la plus élevée d’utilisateurs lourds (moyenne signalée : 30 minutes par jour sur une période de 10 ans).
Alors ? Pour ou contre la 5G ?
On le voit bien, le choix n’est pas simple. La 5G peut en effet apporter énormément à la e-santé et permettre d’améliorer les soins, voire de sauver un grand nombre de vies. Pour autant, personne ne peut à ce jour garantir à long terme la totale innocuité de cette technologie pour les êtres vivants. Alors, doit-on suspendre le déploiement de la 5G selon le principe de précaution ? Doit-on accepter le risque au nom du progrès ? Et vous, qu’en pensez-vous ?